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11 février 2020

Nous n’irons plus aux urnes dans Le Monde libertaire

Nous n’irons plus aux urnes. Tel est le titre de l’essai du Québécois Francis Dupuis-Déri, le tout assorti du sous-titre: Plaidoyer pour l’abstention. L’auteur ne se contente pas de couper les lauriers de l’électorialisme mais il argumente avec force sur l’inutilité du suffragisme. Son apologie de l’abstention est bâtie d’une part sur un refus du «vote utile» et du voter pour le moins pire, ritournelle très utilisée en France depuis plusieurs années. D’autre part, sur l’inefficacité du vote en matière de transformation sociale; d’autant que pendant longtemps,  les «élites» se réservèrent ce «devoir civique» par crainte des pauvres, des femmes ou des esclaves qui auraient pu en faire mauvais usage. «Élites» qui d’ailleurs, quand cela les arrange, n’hésitent pas à jouer de l’abstention. Pour exemple, François de Rugy, dépositaire d’une proposition de loi visant à rendre le vote obligatoire, s’est abstenu de voter 398 fois sur les 648 scrutins à l’Assemblée de 2012 à 2016 (p. 40).

Au-delà, l’auteur dénonce les rituels d’embrigadement (p. 21) de la jeunesse mis en place un peu partout pour conditionner le futur électeur. Que ce soit, lors d’élections dans les établissements scolaires, les conseils municipaux de jeunesse, etc. De fait, la critique de l’auteur porte sur le système délégataire et parlementaire du vote. En effet, il prône, comme dans les écoles alternatives, l’utilisation du conseil comme lieu d’apprentissage de la démocratie réelle, voire de l’autogestion. En bref, Dupuis-Déri défend globalement le principe de l’action directe politique et le refus de la délégation.

Le vote de facto, même dans sa forme obligatoire ou pas, n’a d’autre fonction que d’entretenir l’illusion d’un pouvoir politique détenu par les autres. Un tour de passe-passe habilement orchestré par les libéraux. Alors, à quoi bon élire ceux qui sont «en grande partie responsables de la situation misérable» (p. 58) de beaucoup? À quoi bon, par le vote délégataire, «légitimer l’élite qui gouverne, commande, autorise et interdit» (p. 75)? À quoi bon «élire des parlementaires qui ne décident plus grand-chose» (p. 119) quand de fait le pouvoir est ailleurs: au FMI, à l’OMC… Enfin, «les parlementaires prétendent servir le peuple, mais n’est-ce pas plutôt la population qui travaille pour les parlementaires (p. 120)?»

L’essai se poursuit par quelques exemples de candidatures fantoches, fantasques ou loufoques qui tentèrent, à différentes époques, de montrer l’absurde et l’inutile de «l’électionnisme». En bref, un petit livre facile à lire qui pourra servir à certains afin de résister, avec des arguments à l’appui, contre la «coercition électorale familiale» (p. 9), tendant à forcer le suffrage des plus hésitants. L’ouvrage s’ouvre sur une citation de Lucie Parsons: «De toutes les illusions modernes, le bulletin de vote a été certainement la plus puissante» et se clôt, afin de boucler la boucle, sur «Vos urnes sont trop petites pour nos rêves»! Que dire de plus?

Hugues, Le Monde libertaire, no 1814, février 2020

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